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22 avr. 2020 21:05:03

Coronavirus. L’exercice du droit de retrait face au Covid-19

L’exercice du droit de retrait est prévu et organisé par les articles L. 4131-1 et suivants du Code du travail. Le salarié peut se retirer d'une situation de travail s'il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé (C. trav., art. L. 4131-1). Il doit au préalable informer son employeur ou un représentant du personnel.
L’employeur ne peut contraindre le salarié à reprendre son poste tant que ce danger persiste, et ne peut procéder à aucune retenue de salaire ou sanction si le salarié avait bien un motif raisonnable de penser qu’il existait un danger grave et imminent (C. trav., art. L. 4131-1 et 3).
L’exercice du droit de retrait ne doit pas créer pour les autres une nouvelle situation de danger grave et imminent (C. trav., art. L. 4132-1).

Le coronavirus peut-il constituer un danger grave et imminent ?
Le danger grave et imminent est un danger susceptible de produire un accident ou une maladie entraînant la mort ou une incapacité permanente ou temporaire, et susceptible de se réaliser brutalement dans un délai rapproché.
Le coronavirus entre dans la définition du danger grave et imminent. Cependant, l’existence même d’une pandémie ne crée pas en soi un danger grave et imminent. Le Ministère du travail précise, dans ses questions/réponses au sujet du covid-19, que « il convient de souligner que le droit de retrait vise une situation particulière de travail et non une situation générale de pandémie » (Coronavirus : questions/réponses pour les entreprises et les salariés au 14/04/2020).
L’appréciation se fait effectivement au cas par cas. La gravité de la situation pourra notamment dépendre de l’état de santé du salarié (le rendant plus vulnérable au coronavirus), de son environnement de travail (contact avec le public ou un collègue contaminé, déplacements vers une zone à risque…). En outre, l’exercice du droit de retrait ne doit pas créer pour autrui une nouvelle situation de danger grave et imminent. Le Ministère du travail évoque à ce sujet les personnes extérieures à l’entreprise et notamment les usagers.

La mise en œuvre des recommandations gouvernementales exclut-elle l’existence d’un danger grave et imminent ?
Le salarié en position de danger, doit alerter son employeur ou les représentants du personnel, et peut ainsi interrompre sa prestation de travail tant que l’employeur n’a pas remédié à cette situation en mettant en place des mesures de prévention adaptées.
Dans le cadre du coronavirus, on pense immédiatement aux gestes barrière préconisés de manière généralisée, mais il s’agit également de toute réorganisation permettant d’éviter le risque de contamination (télétravail, annulation des réunions en présentiel, pas de travail à deux sur un même poste…). L’employeur devra également actualiser le document unique d’évaluation des risques professionnels, afin notamment de permettre d’identifier les situations de travail pour lesquelles les conditions de transmission du coronavirus peuvent se trouver réunies et prévoir les mesures de prévention et de protection adéquates.
Le Ministère du travail considère que, « dans le contexte actuel, dans la mesure où l’employeur a mis en œuvre les dispositions prévues par le Code du travail et les recommandations nationales (https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus) visant à protéger la santé et à assurer la sécurité de son personnel, qu’il a informé et préparé son personnel, notamment dans le cadre des institutions représentatives du personnel, le droit individuel de retrait ne peut en principe pas trouver à s’exercer » (Coronavirus : questions/réponses pour les entreprises et les salariés au 14/04/2020).
Ainsi, dès lors qu’un employeur aura mis en œuvre les mesures de prévention et de protection recommandées par le gouvernement, le salarié ne pourrait pas invoquer un droit de retrait. Ceci étant dit, et comme d’ailleurs le rappelle le Ministère du travail, l’appréciation du caractère légitime du droit de retrait relève du pouvoir souverain des juges du fond (Cass. soc., 23 juin 2004, no 02-45.401). Il appartiendra donc aux Conseils de prud’hommes de juger si les mesures de prévention et de protection mises en œuvre par les employeurs étaient ou non suffisantes pour écarter la crainte d’un danger. Le respect des recommandations gouvernementales devrait constituer une condition nécessaire, mais pas forcément suffisante.

Quelles sont les sanctions d’un droit de retrait jugé illégitime ?
Si le droit de retrait est jugé illégitime, le salarié s’expose à des retenues sur salaire, son absence étant alors injustifiée, ou des sanctions pouvant aller jusqu’au licenciement.

Me Emmanuelle POHU
Avocat au Barreau de LYON
www.cde-avocats.fr
© Getty Images

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